Ils s’appellent Chorthippus albomarginatus, “cheval des prés avec une marge blanche” ou simplement criquet marginé et Gomphocerippus mollis, criquet des jachères. Deux espèces à fort enjeu de conservation à l’échelle de l’Occitanie.
C’est une étude conduite par Pierre-Olivier Cochard, consultant naturaliste, qui les a identifiés. Commanditée par le Parc naturel régional de l’Aubrac dans le cadre de son travail d’amélioration de la connaissance des sites Natura 2000, l’étude a porté sur le groupe des orthoptères (grillons, criquets et sauterelles) dans 13 prairies de fauches entre Saint Côme et Saint Laurent d’Olt en août 2023. Ce groupe d’insectes est encore mal connu en Aubrac et pourtant considéré comme un indicateur très fiable du bon état des milieux naturels. 29 espèces d’orthoptères ont été répertoriées, indiquant ainsi le bon état de conservation des prairies. Certaines sont constantes dans beaucoup de types de prairies (criquet mélodieux, oedipode automnale, decticelle carroyée…). Plusieurs sont peu courantes pour l’Aubrac, voire considérées comme fragiles à l’échelle régionale.
“Le criquet des jachères n’était connu que dans le sud de l’Aveyron” explique Bertrand Goguillon, responsable Patrimoine naturel au Parc, avant de poursuivre.
“Cette nouvelle espèce pour l’Aubrac est isolée du reste de ses populations, ce qui la rend particulièrement fragile. Quant au criquet marginé, il est inscrit sur la liste rouge Occitanie car très sensible aux sécheresses marquées dans le contexte actuel du dérèglement climatique. C’est une espèce fréquente sur le haut plateau de l’Aubrac, principalement dans les prairies humides, mais il était jusqu’alors inconnu dans les vallées.”
Pour leur donner un coup de pouce, l’étude préconise de faner l’herbe plus haut ou de laisser des îlots non fauchés. Cependant, l’ensemble des 29 espèces observées vient attester de la qualité de ces milieux agricoles.
“Ces insectes présents en quantité sont aussi un facteur favorable au maintien des oiseaux et autres espèces qui s’en nourrissent. Je pense par exemple à la pie-grièche grise, qui stocke ses proies, insectes et autres petits animaux, sur les pics des barbelés des clôtures ou les épines des buissons. Ses populations s’effondrent au niveau national mais elle est encore présente en plusieurs endroits sur l’Aubrac où elle fait ses nids. Ces prairies de fauches sont des zones refuges” raconte-il. “Et leur maintien passera par une continuité des pratiques telles qu’elles ont pu être menées jusqu’à présent”.