Région rurale de moyenne montagne, l’Aubrac possède un patrimoine encore bien préservé. Son économie rurale, ses paysages, ses savoir-faire, son environnement et son patrimoine culturel reconnus n'en demeurent pas moins vulnérables et menacés.
Pour préserver et valoriser les richesses de ce territoire d’exception, les collectivités, l’État et les socio-professionnels ont entrepris de créer un Parc naturel régional.
Un patrimoine culturel et architectural exceptionnel
L’Aubrac se caractérise par la richesse de son patrimoine agropastoral, avec des vestiges archéologiques ruraux médiévaux très rares en Europe (les traces de la Dômerie d’Aubrac et les granges monastiques), des burons qui sont construits dès le 18ème siècle sur chaque « montagne de traite » pour le logement des gardiens des troupeaux et la fabrication du fromage, des « drailles » qui désignent les chemins de transhumance.
La transhumance, tradition encore vivante, persiste dans les pratiques agricoles ; cette fête, de renommée nationale, accueille plusieurs milliers de visiteurs chaque année.
Majoritairement issus des pratiques agro-pastorales, les produits locaux et identitaires de l'Aubrac bénéficient d’une reconnaissance nationale.
Les productions artisanales (couteaux de Laguiole, travail de la pierre et du bois), agricoles (race Aubrac) et culinaires (aligot, fromage Laguiole, fouace…) sontle reflet d’activités traditionnelles de qualité qui ont su « se moderniser sans perdre leur âme ».
La gastronomie de l’Aubrac (aligot, chou farci, fouace, etc.), fondée sur les produits du terroir (fromage, viande bovine, etc.), est défendue aujourd’hui par de grands noms de la gastronomie. Enfin, de nouveaux produits (Thé d’Aubrac, Estivelle...) font l’objet de projets de développement économiques et de structuration de nouvelles filières.
Le territoire de l’Aubrac possède un patrimoine architectural remarquable, aussi bien vernaculaire (buron, drailles…) que religieux (églises, monastères, croix), qui se caractérise par son intégration dans le paysage avec des murs de basalte ou de granite et des toitures en lauzes. De nombreux sites ou monuments sont d’ailleurs inscrits ou classés aux Monuments historiques.
Au sein du territoire, deux tronçons de la Via Podiensis (chemin de pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle) sont inscrits au Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO pour leur cadre naturel authentique.
Avant tout caractéristique des milieux montagnards, le patrimoine bâti et culturel de l’Aubrac a également été fortement influencé par la présence des nombreux cours d’eau descendant ou entourant le plateau de l’Aubrac. Dans les villages riverains du Lot, comme dans les gorges profondes de la Truyère ou de ses affluents, il reste encore de nombreux vestiges matériels et immatériels (contes, légendes…) des activités économiques et usages passés liés à l’eau : tanneries, moulins, transport du bois par flottage, des vins et des fromages, châtaignes et noix, batellerie…
Les milieux naturels et agropastoraux de l’Aubrac ont fait l’objet de nombreux inventaires qui ont abouti dans certains cas à la mise en œuvre de mesures de protection : 7 sites Natura 2000 et 3 réserves biologiques sont inclus dans le périmètre d’étude.
Ces espaces inventoriés ou préservés recouvrent près de la moitié du territoire. Ils mettent notamment en avant la qualité écologique des zones tourbeuses et humides du haut plateau, des milieux pastoraux, des vallées encaissées du Lot et de la Truyère ainsi que celles des Boraldes et du Bès.
Plus de 1000 espèces ont été inventoriées sur l’Aubrac.
Les milieux prairiaux
Les pâturages d'estives ou "montagnes" ont été formés par déforestation et maintenus ouverts par les animaux menés en estive depuis le moyen-âge. D’abord les moutons puis les bovins ont empêché la forêt de se réinstaller. L’élevage a ainsi façonné ce paysage si emblématique du haut Aubrac et favorisé la richesse et la diversité floristique grâce à un espace maintenu ouvert où la pression de pâturage est restée modérée.
Les prairies naturelles de fauche, généralement situées dans les bas-fonds aux sols humifères, fournissent du foin pour le nourrissage hivernal des animaux. Au printemps, y fleurissent Jonquilles et Narcisses, la Fritillaire pintade, la Tulipe sauvage, l’Aconit napel parfois tue-loup et la Benoite des ruisseaux.
Les landes pâturées
Les landes également pâturées sont surtout présentes sur terrains granitiques. Elles abritent Genêts, Callunes, Brunelles à grandes fleurs ou encore Lycopodes en massue (sous protection européenne).
Les fôrets
Les forêts couvrent 30 % du territoire de l'Aubrac. Sur la partie orientale, la plus boisée du massif de l'Aubrac, le Pin sylvestre et l'Epicéa commun dominent, la première essence s'étant souvent installée naturellement. Les hêtraies-sapinières sont plutôt présentes sur la partie sommitale du plateau. Elles abritent le Lis martagon, la Prénanthe pourpre, le Doronic d'Autriche, la Centaurée des montagnes, le Bois joli, la Maïanthème à deux feuilles et les stations les plus développées de Calament à grandes fleurs (le fameux « thé d’Aubrac ») qui fait actuellement l'objet de productions expérimentales.
Les penchants du plateau, autour des gorges de la Truyère et du Lot, sont principalement couverts de chênaies (Chênes pubescents ou pédonculés). En bord de ruisseaux, les linéaires boisés sont souvent absents sur le haut plateau balayé par les vents. La ripisylve majoritairement composée d'Aulnes glutineux se constitue progressivement avec la perte d'altitude.
Les zones tourbeuses du plateau
Leurs intérêts écologiques (support d’habitat et d’espèces remarquables) et patrimoniaux (milieux naturels relictuels et fragiles) sont majeurs. On y recense des espèces végétales rares comme la Laîche des tourbières et la Laîche à long rhizome, l’Andromède, la Scheuchzéride des marais, la Pédiculaire des marais et quelques rares populations de Ligulaire de Sibérie.
La conduite d’un élevage extensif a permis de conserver une réelle biodiversité. Nombre d’oiseaux sont attirés par les prairies, landes et bocages des hauts plateaux, faciles à explorer et lieux de nidification.
Parmi eux, on peut notamment citer la présence de passereaux (Fauvette, Tarier des prés, Traquet motteux, Alouette lulu, Pipit farlouse et spioncelle), de rapaces protégés ou à haute valeur patrimoniale (Milan noir ou royal, Circaète Jean le blanc, Faucon crécerelle, Aigle botté, Autour des palombes, Faucon pèlerin, Busard cendré et saint Martin) et d’autres oiseaux à fort enjeu écologique (Engoulevent d’Europe par exemple). En période migratoire, il n’est pas rare d’observer également Cigognes noire et blanche ou encore Bécassine des marais…
Les prairies pâturées et les chaos granitiques ou basaltiques sont également le terrain de jeu privilégié de l'Hermine.
La forêt abrite une forte population de cerfs élaphes qui ont été réintroduits dans les années 60.
D’autres mammifères protégés comme la Genette, la Grande noctule ou plus courants comme la Martre, le Putois, le Blaireau, la Belette ou le Renard fréquentent les massifs boisés de l’Aubrac et y « côtoient » des espèces patrimoniales telles que la Bondrée apivore, la Chouette de Tengmalm, le Hibou moyen duc mais aussi des insectes comme la Rosalie des Alpes.
Dans les gorges, les zones humides et les cours d’eau
Les gorges de la Truyère sont considérées comme le second site aveyronnais pour l’observation des oiseaux en raison de l’importante voie de migration, de la densité et de la diversité des rapaces nicheurs.
Les zones humides de l'Aubac abritent de nombreux insectes, batraciens, tritons et reptiles dont le Lézard vivipare ou l’Azuré des mouillères (papillon protégé). Plusieurs espèces de libellules représentatives des espèces montagnardes ont également été identifiées sur les anciens lacs glaciaires.
A noter par ailleurs la présence de la Vipère péliade (espèce protégée par la convention de Berne) en limite sud de son aire de répartition. Elle souffre de la régression des tourbières.
Le Cincle plongeur, le Martin-pêcheur ou le Courlis cendré fréquentent également les abords des milieux aquatiques alors que bon nombre de chiroptères (chauves souris) ou de rapaces nocturnes colonisent les milieux forestiers, les zones bocagères ou rocheuses entourant les Boraldes, les gorges de la Truyère ou du Lot : Hibou grand-duc, Murin à moustaches, Oreillard roux ou encore Murin de Natterer.
Au niveau de la faune piscicole, les ruisseaux et les rivières de l’Aubrac « hébergent » la Truite fario, reine des eaux froides, courantes et oxygénées et ses « compères », l’Ecrevisse à pieds blancs et le Chabot qui fréquentent les mêmes habitats. La Moule perlière, également protégée, a été inventoriée sur plusieurs cours d’eau de Lozère. Elle est fortement menacée.
Quant à la Loutre, elle est revenue « hanter les cours d’eau » de l’ensemble du massif..
Des menaces pèsent sur l'équilibre fragile de l'Aubrac. Le futur Parc naturel régional devra, avec ses partenaires, proposer des solutions pour y remédier.
L’analyse des menaces et fragilités du territoire interviendra dans le cadre de la phase de construction partagée de la charte du Parc. Toutefois, dès à présent, les études réalisées dans le cadre de l’émergence du Parc (étude de faisabilité…) ont mis en exergue des fragilités reconnues et/ou à surveiller.
Difficultés d'échanges et de mobilité : conditions hivernales, peu de transports en communs, disparition des services publics, réseaux de santé et commerces
Diminution du nombre d'agriculteurs, difficultés pour attirer de nouveaux actifs
Manque de neige et réchauffement climatique impactent les activités touristiques hivernales
Enjeux :
Accompagner une agriculture dynamique, en équilibre avec son environnement
Biodiversité fragilisée par certaines pratiques inadaptées : surfréquentation touristique, artificialisation des milieux (aménagement de zones naturelles, dérochements...)
Fermeture des milieux naturels suite à l'abandon de prairies, landes ou espaces boisés
Déséquilibres écologiques : évolutions climatiques et invasions d'espèces exotiques
Enjeux :
Préserver et mettre en valeur certains espaces naturels
Adapter et expérimenter de nouvelles pratiques de gestion
Désertification, vieillissement de la population et départ des jeunes entrainent un risque de perte d'identité et de disparition des traditions et savoir-faire
L'utilisation difficilement contrôlable de certains produits identitaires porte atteinte à l'image et à la qualité des productions de l'Aubrac non protégées par des signes officiels de qualité.
Enjeux :
Contribuer au développement culturel
Maintenir et développer le tissu économique participant à l'identité de l'Aubrac